December 3, 2010
Source: Le Devoir (Quebec)
L’inaction de la communauté internationale et en particulier des pays occidentaux, les responsables de l’essentiel du réchauffement climatique, va coûter la vie à cinq millions de personnes d’ici dix ans et à un million de personnes par année à compter de 2030.
C’est ce qu’indique le premier Bilan de vulnérabilité climatique, publié hier en marge de la semaine de travaux techniques de la conférence de Cancún sur le climat. Ce bilan est le résultat d’une initiative lancée en 2009 par le président Mohamed Nasheed, des Maldives, de petites îles particulièrement menacées par les changements climatiques. Il a été réalisé avec l’organisme scientifique DARA, basé à Madrid. Ce bilan évalue le niveau de vulnérabilité de tous les pays de la planète en matière de santé publique, de désastres météorologiques, de pertes d’habitats et de vitalité économique. Il a été publié le même jour que celui de l’Organisation météorologique internationale (OMI).
Selon cet organisme, l’année 2010 est en lice pour une des trois premières places au sommet des années les plus chaudes depuis 16O ans. Sa place dans ce palmarès ne sera toutefois confirmée qu’après la compilation des mesures effectuées en novembre et décembre. Mais il est d’ores et déjà certain, précisait le communiqué de l’OMI hier, que la décennie qui s’achève dans un mois est la plus chaude depuis 1850, date des premières mesures scientifiques. C’est au Canada qu’on a enregistré la plus importante hausse «anormale» dans la région arctique, près du Groenland, soit 3 °C au-dessus de la moyenne.
Les plus vulnérables
D’autre part, selon le bilan de vulnérabilité climatique, 80 % des 350 000 morts présentement attribuables au réchauffement du climat frappent des enfants de moins de cinq ans en Asie du Sud et dans l’Afrique subsaharienne. Et 97 % de tous ces décès se concentrent dans des pays en développement. Le rapport estime par ailleurs que près de 10 millions de personnes seront aux prises avec les séquelles de la désertification en 2030, comparativement à 2,5 millions aujourd’hui.
Il ressort de ce bilan que les pays les plus pauvres seront effectivement ceux qui vont perdre le plus d’habitats naturels et avoir les pires problèmes de santé publique, notamment en raison des pénuries d’eau qui risquent à leur tour d’engendrer de grandes pénuries alimentaires.
À l’opposé, ce sont les pays d’Europe qui vont avoir le bilan négatif le plus léger globalement. De leur côté, les États-Unis se retrouvent dans le groupe des pays où les impacts sont jugés «importants». Par contre, le Canada et le Mexique se retrouvent un cran plus bas, soit dans le groupe de pays où les impacts anticipés sont jugés «modérés». Mais, précise le rapport, ce sont les pays occidentaux qui devront absorber la moitié de toutes les pertes économiques attribuables aux changements climatiques sur la planète.
Déjà, précise le rapport, 15 des pays les plus vulnérables ont actuellement besoin d’aide pour faire face à des séquelles tangibles du réchauffement. Et 172 autres sur 193 pays vont subir incessamment un premier impact «majeur» de ces changements.
L’Amérique latine et l’eau
Les ressources en eau de l’Amérique latine et des Caraïbes sont aussi menacées par le réchauffement du climat, indiquait un autre rapport publié hier dans le cadre du Dialogue sur l’eau et les changements climatiques qui réunit à Cancún les pays de cette vaste région.
La magnitude et la fréquence croissante des événements extrêmes, qui coïncident paradoxalement avec des sécheresses et des inondations de plus en plus graves, sont en train de transformer ces désastres en enjeux militaires si la raréfaction de l’eau potable prend de l’ampleur.
Selon ce rapport, les pays de cette région doivent non seulement reconnaître l’existence de cette menace sur leur approvisionnement en eau, mais aussi son «imminence».
Les coups d’eau violents, que la terre retient de moins en moins parce que les sols sont débarrassés de leurs forêts au profit de vastes étendues agricoles, menacent l’irrigation des cultures et les réserves d’eau à des fins industrielles.
Les pluies diluviennes menacent de leur côté la capacité des systèmes d’égouts et celle des usines d’épuration, menaçant d’autant les populations en aval. Par ailleurs, le relèvement des océans menace de salinisation les réserves d’eau douce de plusieurs régions côtières.
Toutes ces pressions sont susceptibles d’engendrer des problèmes de santé publique d’une ampleur présentement inconnue, et menacent aussi la sécurité alimentaire de la région, le développement rural et l’économie des pays à vocation agricole, indique le rapport.
Ce dernier conclut à la nécessité d’intégrer dès maintenant l’adaptation aux changements climatiques dans la planification des réserves d’eau d’Amérique latine. À l’heure actuelle, précise le rapport, la gestion courante des ressources en eau et des ressources vivantes qui en dépendent «n’est pas viable».
L’Amérique centrale, conclut ce document très critique, indique qu’il faudrait en arriver à une gestion «régionale» ou extranationale des réserves d’eau en se basant sur le principe que les humains ne doivent prélever que l’eau présente en surplus dans les écosystèmes afin de ne pas menacer leur vitalité.
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